M. Sarkozy plaide à nouveau pour "un toilettage" de
la loi de 1905
LE
MONDE | 19.09.05 | 13h44 • Mis à jour le 19.09.05 | 13h44
Une colonne du temple" , avait dit Jacques Chirac en évoquant
la loi de 1905, celle qui a institué la séparation des
Eglises et de l'Etat. "Un texte fondateur" , a renchéri
le ministre de l'intérieur et des cultes, Nicolas Sarkozy, qui
s'exprimait, lundi 19 septembre 2005, en ouverture d'un colloque organisé
à l'Académie des sciences morales et politiques sur le
thème : "La laïcité française dans son
contexte international : singularité ou modèle ?"
Rendant hommage à "une bonne loi" , "solide",
le ministre de l'intérieur a cependant insisté sur la
nécessité de la replacer dans son contexte d'origine.
"Elle a été adoptée dans un climat de combat.
Puis de texte de combat, elle est devenue un texte d'apaisement"
, a-t-il déclaré. "C'est une bonne loi qui l'est
devenue plus qu'elle ne l'a été -au départ-",
a encore insisté M. Sarkozy. Avant de lancer : "Tout le
monde ne se bonifie pas au fil des années" , en affectant
de ne "viser personne".
Cela
dit, si cette loi s'est bonifiée, à ses yeux, avec le
temps, le ministre de l'intérieur a jugé nécessaire
de "réfléchir aux diver ses modalités d'adaptation"
de ce texte. Le président de l'UMP songe notamment à la
possibilité pour l'Etat et les collectivités locales de
garantir les emprunts pour la construction d'édifices religieux
ou à des avantages fiscaux en faveur des fidèles souscrivant
au denier du culte.
Ces
idées sont dans la ligne de celles qui, en octobre 2004, avaient
accaparé le débat politique. A cette époque, dans
un livre intitulé La République, les religions, l'espérance
(Cerf), M. Sarkozy s'était déjà déclaré
favorable à une "adaptation" de la loi de séparation
des Eglises et de l'Etat pour permettre le financement des mosquées
et la formation des imams sur des fonds publics.
S'attirant
les vives critiques de Jacques Chirac, de Jean-Pierre Raffarin, de Dominique
de Villepin et des laïcs en général, M. Sarkozy avait
défendu sa position au nom de l'intégration de l'islam
en France. "Les musulmans, écrivait-il alors, ne doivent
pas avoir plus de droits. Veillons à ce qu'ils n'en aient pas
moins."
Un
an plus tard, M. Sarkozy, qui se présente en défenseur
d'une "laïcité apaisée", croit venu le
moment de relancer le débat sur un "toilettage" , tranquillement,
en s'abritant derrière sa fonction. "Jamais aucun ministre
de l'intérieur n'a été autant - que moi - ministre
des cultes", a-t-il d'ailleurs déclaré.
Poursuivant
sa réflexion développée il y a peu devant la communauté
Sant'Egidio, le ministre de l'intérieur veut "faire de l'inscription
de l'islam dans le contexte cultuel français" sans
davantage de précision le signe que "l'islam peut
s'intégrer dans une société démocratique,
pluraliste et sécularisée" . "Je préfère
que grâce à l'institut de formation qui existe les rabbins
soient formés à Paris plutôt qu'à Jérusalem
ou Tel Aviv. De même pour les imams, je préférerai
qu'ils soient formés à Paris plutôt qu'au Maroc",
a-t-il indiqué.
M.
Sarkozy a conclu son discours en regrettant que "souvent les responsables
religieux parlent trop bas". "Je ne vois pas la religion comme
une menace" , a-t-il souligné après avoir distingué
"intégrisme" et "fondamentalisme". Car, a-t-il
déclaré, "un croyant croit fondamentalement".
Philippe
Ridet et Nicolas Weill
Article paru dans l'édition du 20.09.05