Pour
le FN, l'immigration reste la cause principale des problèmes
de la France
LE MONDE | 23.02.07 | 14h51 • Mis à jour le 23.02.07
| 20h10
e
n'ai pas changé, j'ai évolué", répète
à l'envi Jean-Marie Le Pen. Il n'a en effet pas changé
comme le montre son programme, qui sera rendu public lors de la
deuxième convention présidentielle organisée,
samedi 24 et dimanche 25 février, à Lille par le FN.
Il continue de considérer l'immigration comme la cause de
tous les problèmes de la France - chômage, crise du
logement, déficit de la Sécurité sociale, délinquance,
dette publique... - et son arrêt comme "la" solution.
Dès son arrivée au pouvoir, le président du
FN s'attellerait à mettre en oeuvre ce qu'il appelle "une
politique d'inversion des flux migratoires (...), d'arrêt
de toute nouvelle immigration (...), d'assimilation de ceux qui
respectent nos lois nos coutumes, acceptent les devoirs qui découlent
des droits accordés et considèrent la France comme
leur patrie, à l'exception de toute autre".
Cette
politique se traduirait par un rétablissement des frontières
et donc une sortie de l'espace Schengen ainsi que la dénonciation
de tous les traités européens concernant l'immigration.
Tout étranger rentré illégalement sur le territoire
serait bien évidemment expulsé. D'autre part, les
personnes sous le coup d'une condamnation judiciaire seront également
priées de repartir au pays "purger leur peine".
Et les ressortissants Français, naturalisés depuis
moins de dix ans, condamnés à plus de six mois de
prison fermes pourraient se voir déchus de leur nationalité.
De
façon à décourager les candidats à l'immigration,
la durée des cartes de séjour passerait de dix à
trois ans, "y compris pour ceux qui se trouvent actuellement
sur notre territoire" et il serait mis fin au regroupement
familial. De même, les patrons embauchant des étrangers
verraient la part de leurs cotisations à la branche maladie
majorées de 35 %, idem pour l'assurance-chômage. Dans
ce dernier cas, la part salariale serait elle aussi augmentée
de 35 %. Seules les cotisations pour les retraites resteraient inchangées,
mais les travailleurs immigrés seraient incités à
retourner dans leur pays d'origine pour y finir leur vie.
Enfin,
les travailleurs étrangers n'auraient plus droit aux aides
sociales qui, comme les allocations familiales, seraient réservées
aux Français. Car sur ce plan-là aussi, le président
du FN n'a pas changé. Il prévoit toujours d'inscrire
la préférence nationale, qui instaure une discrimination
entre Français et étrangers, dans le préambule
de la Constitution. Une mesure associée au changement du
mode d'acquisition de la nationalité française pour
substituer le droit du sang au droit du sol.
Si
"évolution" il y a chez Jean-Marie Le Pen, celle-ci
se manifeste dans la forme et remonte à la présidentielle
de 2002. Il en est ainsi du traitement de la loi sur l'interruption
volontaire de grossesse (IVG). Il y a cinq ans déjà,
le président du FN ne parlait plus de supprimer la loi Veil
sur l'avortement dès son arrivée au pouvoir mais prévoyait,
comme aujourd'hui, un référendum pour inscrire dans
le préambule de la Constitution le "caractère
sacré de la vie, de la conception à la mort".
Il compte, dit-il, sur l'adoption prénatale et sa politique
familiale pour décourager les IVG.
Cette
politique repose sur la création d'un revenu parental d'un
montant équivalent au smic qui serait versé pendant
trois ans pour le premier enfant, idem pour le deuxième et
dix ans pour le troisième. Ses bénéficiaires
auraient également droit à la "protection sociale,
la formation professionnelle et la retraite". Le programme
du FN réaffirme son opposition à l'adoption par des
couples homosexuels et au mariage de ceux-ci.
Autre
exemple, M. Le Pen ne prévoit plus de supprimer dès
son installation à l'Elysée l'impôt sur le revenu
mais prévoit sa diminution progressive. Il souhaite également
"la prise en charge par l'Etat, à hauteur de 200 euros
par mois, de la part salariale des cotisations sociales pour les
salaires allant jusqu'à 1,4 fois le smic".
Toujours
en matière de fiscalité, le FN prône une diminution
des droits de succession en ligne directe et, s'il maintient l'impôt
sur la fortune, il exonère la résidence principale
de celui-ci. Enfin, il diminue l'impôt des PME, dont il entend
faciliter la création et soutenir par toute une série
de mesures.
Hostile
au libre-échange et protectionniste (création de barrières
douanières, instauration de quotas d'importation, etc.),
le programme du FN se montre foncièrement libéral
à l'intérieur de ses frontières. Outre les
diminutions d'impôts consenties aux entreprises, le FN veut
abroger les 35 heures, renégocier la durée hebdomadaire
du temps de travail, mettre la retraite à 65 ans. Il est
pour autoriser le cumul des activités salariées-non
salariées et retraite-emploi.
Enfin,
M. Le Pen ne dit plus qu'il abandonnera tout de suite l'euro pour
revenir au franc mais qu'il exigera au préalable une réforme
de la Banque centrale européenne. Il entend par ailleurs
"proposer à nos partenaires européens une renégociation
radicale des traités dans le sens d'une Europe d'Etats souverains
coopérant sur des sujets d'intérêt commun".
"En cas de réponses négatives ou de non-réponse
dans le délai fixé", le programme du FN prévoit
un référendum demandant si "la France doit reprendre
son indépendance".
Le
FN et son président veulent que la France retrouve sa totale
souveraineté. Il s'oppose en conséquence à
tout impôt européen, refuse la coopération policière
au sein d'Europol, judiciaire avec le "réseau judiciaire
européen", ou Eurojust, mais accepte Interpol ou veut
"rétablir la préférence communautaire
pour lutter contre le dumping social, fiscal ou environnemental".
Partisan d'une armée nationale forte, M. Le Pen président
ferait en sorte que la France quitte l'Eurocorps et l'OTAN et renforcerait
l'armée française. Nostalgique du service militaire
obligatoire, il se contenterait toutefois d'un service militaire
volontaire de six mois.
Christiane
Chombeau
Article paru dans l'édition du 24.02.07.
Le
FN joue la carte populaire en choisissant Lille pour sa convention
présidentielle
LEMONDE.FR avec Reuters | 23.02.07 | 20h08 • Mis à
jour le 23.02.07 | 20h42
'est à Lille, dans le Nord, que le Front national a choisi
de tenir, samedi 24 et dimanche 25 février, sa convention
présidentielle. Un choix qui ne relève pas du hasard,
Jean-Marie Le Pen ayant réalisé au premier tour de
l'élection présidentielle de 2002, un score plus élevé
que la moyenne nationale (16,86 %) dans les deux départements
de la région, avec 19,42 % dans le Nord et 18,41 % dans le
Pas-de-Calais.
L'occasion,
donc, ce week-end, d'y promouvoir un programme "national, populaire
et social" à l'origine, selon le parti, de son enracinement
électoral dans la région."C'est symbolique de
faire à Lille cette convention nationale, dans la ville de
Pierre Mauroy et Martine Aubry, la ville des trente-cinq heures",
explique Philippe Bernard, responsable départemental du Front
national dans le Nord. "La gauche a échoué dans
le social, la fracture sociale est toujours d'actualité et
c'est le FN qui peut y répondre, car c'est le parti du progressisme
social. Nous avons un électorat populaire de plus en plus
important", a-t-il ajouté.
"UN
RÉSEAU DE MILITANTS ORGANISÉS"
Carl
Lang, vice-président du FN chargé des affaires sociales,
juge, pour sa part, "normal" que le discours du FN "trouve
un écho plus important dans le Nord qu'ailleurs, étant
donné les difficultés de cette région".
"Beaucoup d'habitants ont le sentiment d'avoir été
abandonnés par les autres partis et trahis par la classe
politique", ajoute-t-il pour expliquer le transfert d'électeurs
du Parti communiste vers le FN.
Dans
certaines villes, comme Dunkerque ou Denain, l'affaiblissement sensible
du PCF a en effet directement profité au FN. "L'effet
multiplicateur dans la région vient aussi de la présence
de candidats charismatiques avec un réseau de militants organisés",
analyse Pierre Mathiot, professeur de sciences politiques et directeur
de l'IEP de Lille. "Quand ces conditions ont été
réunies, alors les scores des candidats frontistes ont été
sensiblement plus forts qu'ailleurs", ajoute-t-il.
L'illustration
vaut notamment pour la région de Lens, où les souriants
trentenaires du parti, Eric Iorio, Marine Le Pen et Steve Briois,
ont tous les trois atteint le second tour des dernières législatives,
avec plus de 30 % des voix. Au total six candidats FN s'étaient
hissés au second tour dans six des trente-huit circonscriptions
des deux départements. Dans presque la moitié des
circonscriptions du Nord, les candidats frontistes ont passé
la barre des 15 % au premier tour, avec une pointe à 24,3
% à Maubeuge.
Sélection
et suppression de la carte scolaire au programme
LE MONDE | 23.02.07 | 14h52
élection
pour les élèves et concurrence entre établissements
rythment le programme du FN sur l'éducation. "Il appartient
à l'Etat d'instruire ses enfants", précise le
parti de Jean-Marie Le Pen, qui dénonce "les ravages
du pédagogisme et de l'égalitarisme" de l'école
d'aujourd'hui. De même juge-t-il "criminel" l'objectif
de parvenir à 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat.
"Le
chèque scolaire" est la principale mesure préconisée
par M. Le Pen qui, par ailleurs, souhaite supprimer la carte scolaire.
Ce chèque, calculé par rapport au coût moyen
de scolarité d'un élève, permettrait aux parents
de choisir l'établissement dans lequel ils désirent
mettre leur enfant, qu'il soit public ou privé. Et il permettrait
de financer les établissements. Le FN par ailleurs souhaite
modifier les lois Falloux et Astier sur les établissements
privés "afin que les collectivités territoriales
ne soient pas limitées dans le financement des travaux et
des équipements".
"Les
enfants doivent retrouver la valeur des savoirs fondamentaux",
peut-on lire dans le programme, qui proscrit les temps consacrés
à l'épanouissement de l'enfant. Au premier rang de
ceux-ci, les "heures de vie de classe", créées
pour permettre aux élèves de s'exprimer sur la vie
de la classe et de l'établissement ou leur vie tout court.
Le
FN, qui se prononce contre le collège unique et souhaite
"améliorer l'orientation", veut établir
"des exigences de passage et réévaluer la valeur
des examens comme le brevet du collège". En ce qui concerne
le contenu des enseignements, il désire qu'il soit "organisé
de manière structurée et chronologique" et que
l'on revienne, pour l'apprentissage à la lecture, à
la méthode syllabique.
Pour
la formation des maîtres, Jean-Marie Le Pen souhaite remplacer
les IUFM, qu'il qualifie de "centres de déstructuration
et d'endoctrinement", par des centres pédagogiques régionaux.
Il envisage également la suppression de 20 000 postes administratifs
et techniques.
En
ce qui concerne l'université, le programme frontiste prévoit
de réformer "le fonctionnement des conseils d'administration"
afin de donner "un pouvoir réel" aux présidents
des établissements. De même veut-il accorder une autonomie
aux universités pour recruter les professeurs et sélectionner
les élèves en fonction de leurs notes.
Côté
formation professionnelle, le programme du FN donne "aux métiers
et organisations professionnelles" la maîtrise de l'alternance
et de l'apprentissage et créé un "chèque
formation", qui prend en charge les dépenses de formation
professionnelle.
Christiane
Chombeau
Article paru dans l'édition du 24.02.07.
Jean-Marie
Le Pen qualifie les attentats du 11-Septembre d'"incident"
LE MONDE | 21.02.07 | 15h32 • Mis à jour le 21.02.07
| 15h32
elon
Jean-Marie Le Pen, les attentats du 11 septembre 2001 perpétrés
par Al-Qaida contre les tours jumelles du World Trade Center à
New York ne seraient qu'un "incident". Au journal La Croix,
qui lui demande, dans son édition du 21 février, ce
qu'il pense "de l'initiative commune prise par les responsables
des grandes religions - islam compris - de dénoncer les attentats
de New York de 2001", le président du Front national
répond : "C'est une excellente chose. Mais elle fait
partie de ces pétitions de principe qui ont une influence
éphémère. Sur le moment, l'événement
du 11-Septembre, pour ne pas dire l'incident, a conduit un certain
nombre de gens à prendre leurs distances pour ne pas tomber
sous le coup des accusations qui étaient alors lancées."
Les
journalistes de La Croix s'étonnant de l'utilisation du mot
"incident" pour parler de l'attentat qui fit près
de 3 000 morts, Jean-Marie Le Pen déclare : "3 000 morts,
c'est ce qu'il y a en un mois en Irak, c'est beaucoup moins que
les bombardements de Marseille ou de Dresde à la fin de la
seconde guerre mondiale, qui étaient aussi des actes terroristes
car ils visaient expressément des populations civiles pour
faire capituler des militaires."
Adversaire
de la politique américaine dans le Golfe, opposant de l'intervention
en Irak, Jean-Marie Le Pen a toujours minimisé les attentats.
Après avoir pris la précaution de préciser
qu'il a "toujours condamné sans équivoque la
pratique du terrorisme, de tous les terrorismes", le président
du FN avait ainsi estimé, le 21 septembre 2001, que les attentats
du 11-Septembre étaient "directement liés"
à la politique américaine.
SABLER LE CHAMPAGNE
Une
justification politique qu'il avait réitérée
par la suite et notamment lors de son discours de clôture
de la fête de Bleu-Blanc-Rouge, le 23 septembre 2001 à
Paris. "Nous ne devons pas nous aligner comme le premier des
serfs ou des vassaux des Etats-Unis" qui paient leur "politique
hégémonique dans le monde", avait-il déclaré
avant de conseiller à la France de se préoccuper de
sa situation interne. "Certains seront tentés d'adopter
le point de vue à la mode et réduiront l'analyse à
la lutte contre le terrorisme islamique (...) mais là n'est
pas l'essentiel. Le risque pour la France est celui de la submersion
et de la subversion à partir d'une folle politique d'immigration
qui a fait entrer chez nous des millions d'étrangers tandis
qu'on poussait à la désintégration de la nation
et de la République", avait-il poursuivi.
A l'époque,
le FN avait été partagé entre ceux qui souhaitaient
une solidarité de l'Occident et ceux qui estimaient que les
Etats-Unis payaient le rôle de "gendarme du monde qu'ils
s'étaient assignés". Certains, parmi ces derniers,
avaient été jusqu'à sabler le champagne, le
11 septembre 2001, au siège du FN, avant que Jean-Marie Le
Pen, qui avait alors commencé sa campagne présidentielle
de 2002, ne calme leurs ardeurs.
Christiane
Chombeau
Article paru dans l'édition du 22.02.07.
AFP/MARTIN
BUREAU