Chirac:
Monsieur 1%....
Chirac: une année
en enfer
jeudi 22 décembre
2005, 14h00
PARIS (AP) - En
janvier 2005, un tiers des Français souhaitait encore, selon
les sondages, que Jacques Chirac soit candidat à la présidentielle
de 2007. En décembre, ils étaient... 1%. La chute est
vertigineuse, à l'image d'une année maudite pour le chef
de l'Etat.
Un référendum
perdu, des Jeux olympiques 2012 qui échappent in extremis à
la France, des banlieues qui s'embrasent et un séjour à
l'hôpital: rarement année aura été aussi
éprouvante pour Jacques Chirac. Au point que 2005 restera comme
un moment-charnière, l'amorce d'une fin de règne.
Le président
français avait pourtant décidé de prendre l'initiative
en appelant les Français à se prononcer par référendum
sur la Constitution européenne. La date du scrutin était
fixée au 29 mai, soit quelques jours après l'anniversaire
de ses dix ans au pouvoir, un cap qui avait été synonyme
de début des ennuis pour le général de Gaulle ou
François Mitterrand. Un succès au référendum
aurait permis au chef de l'Etat d'aborder dans une bien meilleure position
ses deux dernières années de mandat.
Las! La campagne
tourne vite au fiasco. "Si vous voulez vous tirer une balle dans
le pied, faites-le, mais après, ne protestez pas. C'est une connerie,
je vous le dis", s'énerve Jacques Chirac en février
devant des agriculteurs partisans du "non".
Pour tenter de convaincre
les Français, il opte pour un débat avec des jeunes. Raté:
"je ne vous comprends pas", finit-il par soupirer après
un long dialogue de sourds. Le 29 mai, les Français lui répondent
"non" à 54,67%.
Jacques Chirac n'avait
pas reçu une telle gifle depuis la dissolution ratée de
1997. Son dixième anniversaire se mue en désastre politique.
Deux jours plus tard, le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin cède
sa place à Dominique de Villepin, un pilier de la chiraquie.
Mais le président doit manger son chapeau en rappelant Nicolas
Sarkozy au gouvernement.
Quelques bonnes
nouvelles viendront lui donner un peu d'air: le 12 juin, la journaliste
Florence Aubenas et son guide Hussein Hanoun sont libérés
après 157 jours de captivité en Irak. Le 28 juin, la France
et son site de Cadarache (Bouches-du-Rhône) sont choisis pour
accueillir le réacteur à fusion nucléaire ITER.
Mais l'embellie
est de courte durée: le sommet de Bruxelles qui devait permettre
aux Européens de se mettre d'accord sur un budget de l'UE est
un échec après un bras de fer entre Paris et Londres.
Et le 6 juillet, c'est encore Londres qui est choisie pour accueillir
les Jeux olympiques de 2012, au détriment de Paris.
Alors Jacques Chirac
positive. Le 14 juillet, il assure avoir puisé dans l'échec
du 29 mai "une énergie, une ambition nouvelles" et...
refuse d'exclure une candidature en 2007. Mais quand il cherche à
éviter l'affrontement, Nicolas Sarkozy, lui, attaque. Le ministre
de l'Intérieur organise "sa" garden party pour la fête
nationale, au cours de laquelle il dresse un parallèle historique
osé entre le chef de l'Etat et un Louis XVI occupé "à
démonter tranquillement les serrures à Versailles pendant
que la France gronde".
Mais le coup le
plus dur porté au chef de l'Etat le sera le 2 septembre. Il est
alors hospitalisé pour une semaine au Val de Grâce pour
un "petit accident vasculaire" ayant "entraîné
un léger trouble de la vue". La chiraquie tente de minimiser
l'épisode, mais le mal est fait et le regard des Français
a changé.
Et nombre de ses
"amis" de droite en déduisent que c'est le moment de
tourner la page. La vraie question est désormais de savoir choisir
son camp entre Nicolas Sarkozy le rebelle et Dominique de Villepin le
dauphin.
Jacques Chirac se
serait-il résigné, décidé à faciliter
le travail à son successeur? Alors que les banlieues s'enflamment
le 27 octobre, marquant l'échec de dix années de lutte
contre la "fracture sociale", il parait étrangement
absent, laissant son Premier ministre annoncer lui-même la proclamation
de l'état d'urgence. La crise propulse au devant de la scène
Dominique de Villepin, ancien proche collaborateur du président
qui, déjà, avait pris sa place au conseil des ministres
pendant son hospitalisation.
Aux yeux de l'opinion,,
il apparaît alors comme celui qui tient les rênes de l'Etat,
ce qui va lui permettre pour la première fois de talonner Nicolas
Sarkozy dans les sondages pour la présidentielle. Si Jacques
Chirac avait voulu porter son successeur préféré
sur les fonts baptismaux, il ne s'y serait pas pris autrement. AP
co/mw